Enquête eupinions - Guerre en Ukraine : recul du soutien. Les électeurs européens inquiets du coût de la guerre.
Après près de deux ans de conflit entre la Russie et l’Ukraine, la plupart des Européens continuent d’approuver le soutien des gouvernements de l’UE à l’Ukraine. Mais, alors que débute la campagne pour les élections européennes de juin, une nouvelle étude eupinions révèle des inquiétudes quant à l’impact économique du conflit et de la reconstruction en Ukraine. Certains signes montrent également que la détermination s’estompe, en particulier dans certains pays clés comme l’Allemagne et la Pologne, en ce qui concerne la fourniture d’armes, l’accueil des réfugiés ukrainiens ou l’adhésion de l’Ukraine à l’UE. Les Belges partagent ces inquiétudes économiques, mais restent généralement plus cohérents dans leur soutien à Kiev.
La dernière enquête trimestrielle réalisée au sein de l’UE par eupinions, l’outil de sondage de l’opinion européenne développé par la Bertelsmann Stiftung et soutenu par la Fondation Roi Baudouin, a été réalisée en septembre dernier. L’enquête sur les attitudes à l’égard de la politique de l’UE dispose de données comparatives remontant à 2015 et inclut des questions sur l’Ukraine depuis mars 2022, juste après l’invasion russe. Des questions économiques et financières liées à l’Ukraine ont été ajoutées dans le dernier questionnaire.
Les résultats révèlent que, malgré une sympathie générale pour les efforts en faveur des Ukrainiens, une nette majorité de citoyens de l’UE s’inquiètent de l’impact que cela pourrait avoir sur l’économie de leur pays. Dans l’ensemble de l’UE, 59 % des personnes interrogées estiment que la reconstruction de l’Ukraine imposera un fardeau économique, et ce chiffre atteint même les 70 % en Allemagne, la plus grande économie de l’Union. Parmi les Belges, 56 % y voient une charge et 44 %, une opportunité. Seuls les Polonais voient davantage d’opportunités que d’inconvénients à reconstruire leur grand voisin – et encore, d’une courte tête seulement.
La majorité est favorable à une aide financière à l’Ukraine lorsqu’elle commencera à se reconstruire à l’issue du conflit et à préparer son adhésion à l’UE. Toutefois, ce chiffre est bien inférieur au niveau de soutien aux premières mesures de solidarité au lendemain de l’attaque-surprise de Moscou. Alors que 56 % des personnes interrogées estiment que l’Ukraine devrait bénéficier d’un financement pour la reconstruction, un Européen sur cinq (21 %) s’y oppose catégoriquement. En Allemagne, qui finance un quart du budget de l’UE, 27 % des personnes interrogées y sont opposées, tandis que 53 % y sont favorables. En France, deuxième contributeur au budget de l’UE, jamais le soutien à l’aide financière à l’Ukraine n’a été aussi tiède, avec 48 % des personnes interrogées. En Belgique aussi, avec 52 %, le soutien à l’aide financière est inférieur à la moyenne de l’UE, tandis que 24 % des Belges sont opposés à l’octroi d’une telle aide financière à Kiev.
Combinées au recul d’autres indicateurs de soutien à l’Ukraine, ces nouvelles données mettent en évidence la possibilité que des acteurs politiques davantage favorables à la Russie et opposés au consensus actuel de l’UE puissent exploiter les inquiétudes économiques des électeurs pour accroître leur représentation au Parlement européen lors des élections de juin.
Les Belges sont restés plus cohérents que beaucoup d’autres Européens dans leur position à l’égard de l’Ukraine, et ce soutien est aujourd’hui largement conforme à la moyenne de l’UE. Ainsi, quelque 63 % des Belges sont toujours favorables à l’envoi d’armes de l’UE à Kiev, contre 65 % en mars 2022 (et 58 % seraient toujours prêts à envoyer des armes belges, contre 60 % 18 mois plus tôt). Depuis le début de la guerre, le soutien des Belges à l’adhésion de l’Ukraine à l’UE a diminué de deux points (aujourd’hui à 62 %), et celui pour l’accueil des réfugiés a chuté de huit points (aujourd’hui à 76 %).
En revanche, le soutien à l’envoi d’armes par l’UE à l’Ukraine a chuté de sept points en France et en Allemagne. Depuis le début de la guerre, le soutien global à l’adhésion de l’Ukraine à l’UE a chuté de six points sur l’ensemble de l’Europe, et de 12 points en Pologne. Et si 75 % des Européens estiment toujours que les réfugiés ukrainiens sont les bienvenus (contre 86 % après l’invasion russe), on observe des chutes importantes de 18 points en Pologne (65 %) et de 16 points (70 %) en Allemagne.
« Cela pourrait offrir des opportunités de campagne aux acteurs politiques radicaux dans toute l’Union européenne », déclarent Catherine de Vries et Isabell Hoffmann, d’eupinions. « Alors que nous entrons dans la saison électorale, les dirigeants européens devraient expliquer plus clairement pourquoi le soutien à l’Ukraine est important pour leurs électeurs. Leurs adversaires n’hésiteront certainement pas à tirer profit du doute et de l’incertitude. »
Pour plus d’informations, consultez les documents de recherche ‘A Burden or a Bond?’ et ‘Ukraine Trends September 2023’.